Nous étions tranquillement accoudés au comptoir du bar de l'hôtel quand Cécile fut pris par le remords.
-Ces vacances, fit-elle, étaient méritées, mais j'aurais aussi pu partir moins loin.
Tandis que le barman nous confectionnait un cocktail de la meilleur composition qui fusse, je délivrai à mon amie le sentiment qui était le mien à cet instant.
-Cécile, tu as besoin de te ressourcer. Tu t'es saignée aux quatre veines pour que prospère ton mouvement politique. Tu oeuvres au quotidien pour le développement durable. Du moins, l'exploitation durable mais responsable écologiquement. Tu te dois de faire une pause.
-Un break, me répondit-elle, démontrant par là-même sa verve Green Business.
Cécile avait toujours eu comme point d'orgueil à être en conformité avec ses idéaux, dont la noblesse n'est plus à démontrer. Aussi, quand nous franchîmes, d'un pas alerte, les quelques mètres qui séparaient le bus de l'avion, elle s'écria: "Cachez cet airbus que je ne saurais voir!".
Car Cécile était comme ça. Elle affichait sa droiture afin qu'on ne la prît point en défaut. Elle répétait à l'envi n'avoir franchi que trois fois les frontières du territoire national.
La chose m'apparût étrange. Pour une jeune femme en théorie sensible aux problèmes mondiaux, et résolue à y remédier, ce sédentarisme conférait à la palinodie.
Cas de conscience à part, nous effectuâmes un délicieux séjour. Nous avons goûté aux joies de la plongée sous-marine, traversé quelques charmants bidonvilles, et pillé à chaque repas le copieux buffet du Resort Palace où nous logions à la suite Prince Albert. Exotisme surfait, bains de soleil cancérigènes, massages vivifiants par les soins de rustiques indigènes, le must en terme de remise en forme. Nous avons même eu la chance d'accueillir notre ami rouquin, notre patriarche à nous, l'homme sans qui nous aurions pu atteindre ce score historique aux européennes. Dany est venu en voisin, lui qui passait ses vacances à la Réunion, a aussitôt embarqué à bord d'un Falcone sitôt notre présence dans l'archipel connue.
-A quelques milliers de bornes près, on aurait pu se manquer, c'eût été trop con!
Ravi de le recevoir, et de le voir formuler une phrase en termes corrects, lui qui n'est que massacreur de synthaxe, Dany nous gratifia de compliments énamourés sur notre bronzage.
Nous allâmes ensuite prendre l'apéritif à l'hôtel et assister à la remise du Prix du Développement Durable, remis simultanément cette année aux dirigeants de Total et de Texaco. Lors de cette mémorable soirée, nous fûmes même conviés à la table du jury, où Bono, un général chilien en retraite, et un marchand d'armes israélien en cavale, nous firent l'honneur de partager leur repas.
-D'où viennent les gambas? S'interrogea Cécile, une nouvelle fois pris par le remords.
-De l'Océan Pacifique, des Philippines pour être exact, répondit le maître d'hôtel.
La chair des crustacés était si tendre qu'on ne s'offusquât point qu'elles fussent acheminés par avion, et qu'en matière de bilan carbone, on aurait pu mieux faire.
Le séjour fut donc réussi. Depuis son retour, Cécile me le cache, mais je crois bien qu'elle est à nouveau en cloque. Ce n'est pas très malthusien ça, elle en est presque à son cinquième chiard.
Nous vous confierons la suite de nos aventures, après notre bref séjour à Davos, où Schwarzenegger, Al Gore, des écolos comme nous, nous ont conviés à une table ronde intitulée: "Tartufferie: Quand les amis de la Terre s'y vautrent".
Monsieur C. Les vacances de Madame Duflot.
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